18.3.05

sur le penchant des jours: l'histoire de Miny (suite)

le nouveau conte de Miny: Coralline



Le jour Coralline habite la grande chambre du bas. Elle est bien souriante. La fenêtre est ouverte. Le grand monsieur noir qui passe lui fait un salut bien poli. Elle lui adresse le sien avec un petit signe en plus pour montrer qu’on est bien égaux. Elle sort avec la voisine et son petit chien. L’air est spongieux. Les murs sont spongieux. Elle se sent tout à fait soluble. Petits cancans sucrés. Gros bobos enfiévrés. Un grain de poivre sur la langue. Odeurs fraîches des fenêtres. On respire bien.
Ça pourrait être ça sa vie.

Mais il y a la chambre du haut. Depuis la nuit des temps elle y fabrique un enfant que personne ne connaît. Elle, elle a sa petite idée. Une belle petite idée qui pousse en fleurs multiples qu’elle entretient et soigne avec ferveur.

Chaque soir elle s’interroge : est-ce bien ainsi ? Ce n’est qu’une ébauche. Parfois une rêve dans la nuit. Sûr elle va réussir. Du lait coule de ses doigts. Dans le linge de l’armoire sont les synapses empilées, des petits ponts vers tous les temps. Ce sera un enfant des temps futurs avec des cheveux de vent, le grand souffle des commencements. Elle lui racontera des histoires. Des histoires de revenants qui lisent l’avenir et le présent et il sera tout content, l’enfant.

Mais demain il y a école. L’école des autres enfants. Alors elle le range bien à l’abri dans un placard, à côté de l’armoire aux mémoires, parmi les stocks de neurones dormants, de petits flacons hormonants et les grimoires de tous les temps. Demain elle ira voir dans la rue s’il y est. Parce que lui aussi il a sa petite idée. Alors elle le ramènera prudemment. La rue c’est pas pour les enfants. Un lieu où passe le monsieur noir si souriant. On ne sait jamais.




Quand il sera grand il fera des avenues. Des avenues larges comme le monde où seront tous les enfants. Des noirs, des jaunes, des blancs. On aura rasé toutes les maisons -ni portes, ni fenêtres- pour que puisse souffler le vent, le vent tiède des planètes, des bouquets d’étoiles et des mondes errants. Il n’y aura plus que des enfants, des enfants-mères, des mères enfants .

à suivre..

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