5.9.07

RENTREE SCOLAIRE

MA PREMIERE RENTREE SCOLAIRE (comme enseignante: 1939)
(extraits d'autobiographie)

"Ce fut vers la fin de l'été, par un bel après-midi de paix et de moisson que le vent de l'histoire se leva.
Finies les prestidigitations de Munich, les congratulations, le parapluie de Chamberlin, le chapeau de Zozo et la crédulité naïve des peuples. Il allait falloir mourir pour Dantzig.
J'étais à ma fenêtre. Quelqu'un, en bas, venait d'asséner l'ahurissante nouvelle : La guerre!
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Quant à nous, Jacqueline ( mon amie de pension) et moi, il nous fallait changer notre fusil d'épaule. A cause de la guerre l'école de Reims ne reprenait pas de pensionnaires. Que faire? Les instituteurs mobilisés, on recrutait des suppléantes : c'était une chance de pouvoir entrer dès lors, de plain-pied dans le métier auquel nous nous destinions. Nous fîmes une demande de poste, sollicitant par la même occasion la faveur d'être nommées proches l'une de l'autre et si possible pas trop loin de notre domicile.
C'est ainsi que je fus nommée à V….., à une dizaine de kilomètres de mon village…., Jacqueline à V…..à trois ou quatre kilomètres de moi.

Par un clair matin d'automne, de feuilles jaunies et d'odeurs puissantes, je partis à bicyclette vers mon nouveau destin. La directrice qui m'accueillit, digne et un peu distante, me conduisit vers une maison humide et froide, tout au fond d'une venelle où on avait établi une annexe pour la classe enfantine qui m'était attribuée. Elle me confia les registres réglementaires, quelques livres, et je ne la revis jamais ni pour me tracasser, ni pour m'aider, et j'étais satisfaite de mon domaine écarté. Le maire me logea dans la cuisine d'une maison particulière dont la propriétaire était partie habiter chez sa fille dans le Doubs. On y installa un petit lit de fer et j'eus l'usage de tout ce qui constitue habituellement une cuisine, mais qu'elle était froide et humide cette pièce légèrement enterrée, avec son poêle qui tirait mal! J'avais à peine le temps de l'allumer le matin, qu'il fallait partir " faire" le feu à l'école pour que les petits aient chaud en arrivant. De la façon dont il fallait s'y prendre pour les occuper, les instruire, je n'avais que les souvenirs de ma propre scolarité et toute ma bonne volonté. Et ce n'était pas une classe facile. Deux niveaux : section maternelle et cours préparatoire. J'avais bien hérité, dans un placard, d'un beau fouillis de cubes, papiers, tresses et gommettes pour occuper les plus petits, qu'on ne pouvait - vu leur âge - réduire au silence et à l'immobilité et qui s'en donnaient à cœur joie de papiers froissés, de crayons cassés, de cubes bondissant sur le sol, mais pendant longtemps, j'ai rêvé que la journée s'était passée sans que j'aie fait lire les plus grands! Cependant j'étais, dans l'ensemble, confiante et assez inconsciente. J'aimais leurs petites frimousses : c'étaient mes élèves, mes premiers élèves, à moi. Et quand je traversais le village le matin je me sentais grandir de quelques centimètres.


Je fus bien contente aussi de ma première paye, 975 francs que j'économisai soigneusement. Mes dépenses se réduisaient à peu de choses. Chaque mercredi et samedi soir je revenais à la maison, ma valise sur le porte-bagages arrière de ma bicyclette. Je retrouvais avec la chaleur du foyer, les nourritures fondamentales et je repartais les lundi et vendredi matin avec toutes sortes de provisions et mon linge propre. Je tarabustai même mon père pour qu'il me fabriquât des cadres à tisser pour occuper mes élèves d'une manière plaisante et originale, mais, hélas, inadaptée à leurs possibilités. Je n'avais pas l'art de simplifier les choses, ni le bon sens de soulager mes parents qui, par une sorte de prescience des restrictions à venir continuaient à augmenter leur cheptel.( volailles et lapins)
Je m'inscrivis aux cours par correspondance, bien décidée à préparer la deuxième partie du B.S. ( Brevet supétieur)
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5 commentaires:

Rosie a dit…

Que de beaux souvenirs, vous nous partagez, plaisant à lire.

J'espère qu'il y aura une suite.

Bonne journée et bisous d'une p'tite cousine du Québec. xoxox

Brigetoun a dit…

merci à vous, les maitres et les maitresses/.
Trop jeune pour avoir connu le classes pendant la guerre, je n'ai eu que celles d'après. Mais les difficultés matérielles n'étaient pas toutes levées

Anonyme a dit…

Comme j'aime ton récit, Micheline ! Je me suis retrouvée avec toi dans cette classe, près du poële qui ronronne, je t'ai suivie en vélo et j'ai entendu les bruits de la classe. Oui j'aime vraiment lire ce genre de récit souvenir, si tu en as d'autres ce sera un plaisir. Gros bisous.

Rosie a dit…

Juste un p'tit coucou en passant en ce jeudi.

Passe une belle journée et bisous de ta p'tite cousine du Québec xoxoxox

micheline a dit…

ces souvenirs lointains sont bien mélangés...et précèdent de peu l'évacuation devant l'invasion allemande..je vais essayer d'en faire un petit schéma.
Pralinette, je suis allée sur ton blog , très contente de cette atmosphère de paix et de bonheur mais on ne peut plus mettre de comments ????