19.3.06

MES VACANCES DE PETITE FILLE

C'était un miracle quand nous pouvions quitter la maison pour un bref voyage dans les familles, dans celle de mon père surtout.
C'était une fête que les cousins retrouvés, que les greniers et les granges odorantes de Savoyeux.
Quand la Saône retirée dans son lit, avait laissé dans les prés de grandes poches d'eau, les noues, mon oncle nous emmenait y lancer l'épervier qui capturait dans ses mailles tout un frétillement de jolis poissons brillants.
Il y avait aussi un grand jardin de sable où foisonnaient pêle mêle la menthe, la salade ou le pied d'alouette avec lequel on fait de si jolies rosaces, la goutte de sang, et la superbe prune-pêche échouée dans les choux.
Nous couchions chez ma grand-mère, ma petite grand-mère ratatinée comme les pommes qu'elle nous gardait précieusement, jusqu'à l'extrême limite, sous son lit.

Elle habitait une seule grande pièce, toute proche de la maison de sa fille dont elle formait une sorte d'annexe, depuis que l'hémiplégie mon grand-père les avait obligés à quitter la ferme de la Madeleine. Maintenant qu'il était mort elle vivait là, seule.
Deux grands lits, au fond, séparés par la comtoise, deux armoires, une grande commode avec des portraits et des bibelots, une table ronde au milieu, un grand fauteuil près de la fenêtre du jardin et encore près de la porte, une table minuscule avec sa cuvette d'émail, le seau d'eau fraîche posé par terre, précieusement protégé des poussières par un couvercle.

Le matin on se réveillait au bruit du soufflet qui ranimait la braise, à l'odeur du lait et du café qui chauffaient, au son grêle de la comtoise. Ma douce petite grand-mère venait ensuite nous glisser, avec le premier baiser du matin, un petit morceau de chocolat qui me barbouillait parfois le cœur.

Chez une de mes tantes, à Lœuilley où nous allions quelquefois passer une semaine de vacances, c'était une fête un peu plus mélancolique, sans enfants de notre âge, mais non sans spectacles fascinants : l'immense cour avec son grand fumier central où trônait, au milieu de toutes sortes de volailles, un coq puissant et terrible ; l'abreuvoir de pierre où, à portée de main, venaient les chevaux et les vaches laitières, aspirer l'eau vivante dans une sorte de recueillement d'aise. La soue aux cochons, grouillante de groins avides et turbulents. Quand ma tante déversait le seau de nourritures mêlées, il fallait prendre garde !

Dans cette ferme, pendant les années 30, on pouvait encore voir cuire le pain au four, glisser la calotte de crème, décollée au doigt du pot de grès, dans la baratte de bois où allait s'opérer la transmutation. Tout à coup quand on avait, à genoux par terre sur un sac plié, longtemps tourné la manivelle, on entendait un grand floc : le beurre était pris. On ouvrait, on sortait la pâte dorée qu'on lavait à grande eau. Le petit lait irait aux cochons mais auparavant, on en appréciait l'aigrelette saveur dans un grand bol à fleurs.
Ce qui me plaisait moins c'était la robe à rayures ou à fleurettes grises que ma tante me faisait confectionner par la couturière du village, dans le reste de ses jupons de paysanne.

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Très belle description de ton enfance avec un style qui invite à lire. Bonne soirée

Anonyme a dit…

Bonsoir Micheline...
Je suis encore à Brie Comte Robert chez mes parents... ma petite nièce vient de partir et Appollon s'est assoupis dans la banquette... il n'a pas led roit d'y aller normalement mais là au moins il se repose et je peux le voir.... J'ai pris mon plein de bisous et de calins... Mes parents sont sortis au César Palace à Paris avec des Amis pour l'anniversaire de ma maman et ne devrait pas tarder à rentrer...
J'ai ma voiture ... je met un peu plus d'une heure pour faire les 50 km qui séparent voisins le bretonneux en yvelines à Brie Comte Robert en seine et marne...

Elles étaient quand même chouette tes vacances... et c'est si bien raconté... Bonne soirée Micheline. Bisous Isabelle.
ça y est mes parents viennent de rentrer.. il est 18h15... gros bisous

Anonyme a dit…

au fait je n'ai pas répondu à ta question concernant ma petite Fée... J'ai fais la connaissance en vrai de Syl du blog :
sylone.over-blog.com
Elle est super géniale et m'aide vraiment beaucoup à combattre mes problèmes... c'est la première amie que j'ai et elle est vrai super.. Bisous Micheline.

Muse a dit…

j'aime beaucoup ta façon d'écrire et cela ressemble beaucoup à certains épisodes de mon enfance...