Nous allons voir la lingerie, les belles machines neuves et modernes, avec cartes perforées, les grandes tables où s'empile le linge à repasser. Tout est propre, net. Le petit atelier où le mari prépare les abat-jour. De grandes peaux achetées directement aux abattoirs attendent d'être découpées avec soin après avoir été tannées.
Cette rampe d'escalier dans l'entrée, c'est le mari qui l'a dessinée. Tout en chêne massif. Je me sens apprivoisée par ces gens, par ces choses en gestation.
La grande salle qui sent le bois, le feu de cheminée, les grosses pierres apparentes, tout cela est juste assez naturel, assez conventionnel aussi pour que mon esprit glisse sans accrocher. Pas de prise à la bête sournoise, meurtrie de brûlures inconscientes et qui dort. Ne pas l'éveiller surtout. Tenir en laisse un mince filet de vie. Tout simple.
La neige. Toute blanche. Toute propre. Mon ensemble de ski est tout à fait douillet autour de mon corps. A ma soeur je dois le confort des bottes de cuir fourrées, du bonnet et de la longue écharpe moelleuse.
Je pense à ses pieds qui marchaient dedans, à son souffle qui traversait la laine. Je ne suis pas triste. Je suis un peu elle. Je suis un peu morte à l'intérieur et elle... elle est bien à l'abri aussi. Mon esprit s'endort. De la neige fouettée me cingle les paupières. Je marche contre le vent. Il faut marcher. C'est une idée comme ça, que j'ai encore. L'idée que ça fait du bien. Il faut se faire du bien. On est venu pour ça. Je sens l'air entrer profondément dans mes poumons et sortir à longue haleine. On force un peu le pas, pas trop, juste ce qu'il faut pour sentir que l'on marche. Pierre marche aussi, sans rien dire, un peu en avant. D'accord. De parti pris, d'accord avec tout. Quitte à exploser, à l'improviste pour on ne sait quelle obscure raison, dévastant d'un seul coup notre fragile équilibre.
Une seconde j'imagine que je suis là, toute seule à marcher sur cette route inconnue.
Impossible. Je me repose sur lui. Je lui abandonne les repères, les distances, l'orientation des routes. Je force un peu mon indifférence à choisir ou reconnaître les lieux. Je préfère ne pas regarder, je marche comme une bête. Je vois un arbre tout blanc. Tout propre. C'est suffisant.
Nous rentrons un peu étourdis. Deux anoraks, deux paires de ski dans l'entrée, seuls témoignages d'autres êtres ici. On les apercevra à peine. Tant mieux. Lui un petit moustachu aux longs cheveux, elle une asiatique aux cheveux raides, noir jais.
Le lendemain la neige fond. Le ciel est tout chargé. La route grisaille. Diversion : l'hôtelier nous propose une virée à Laguiole, à une quinzaine de kilomètres. Il va là-bas, en 2CV, porter des tables au "collègue".
Je grimpe à l'avant …..
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4 commentaires:
Te voilà bien partie pour une nouvelle... ta description est si vraie qu'on te suit pas à pas... dans la neige.
Bien sympatique cette virée. Alors bon week end maintenant et repose-toi bien.
Je regarde fondre la neige, Mamounette à côté de moi. On te fait un signe en voyant passer la 2CV. Tu souris, tu fait ta fière. Tu parais un peu petite, le siège doit être un peu creux. La voiture n'est pas neuve : Tu nous as promis de nous rapporter à chacun une douzaine de couteaux. On aime les souvenirs utiles, pas tellement les babioles.
... tu racontes si bien qu'on t'accompagne !
C'est bizarre, j'avais passé un second com pour te demander d'avoir la gentillesse de corriger mes fautes : "tu fais à la place de tu fais" et remplacer les deux points devant "Tu nous a promis" par un seul, et je ne vois pas mon com. Il n'a pas dû passer.
Je reviens sur tes autres...
A tout de suite.
non je n'ai pas eu ta demande de correction ,je me suis dit :il a écrit à toute vitesse, le temps d'apercevoir la 2CV, et moi toute petite et fière dedans, alors j'ai bien rigolé ..mais moi je vous avais bien vus : 2 galopins en train de lancer des boules de neige sur la voiture!
pour ce qui est des couteaux , si vous en voulez il faut préparer une pièce en échange, autrement ça coupe l'amitié de recevoir un objet coupant..
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