20.12.06

le temps où je fus en pension:PREPARATIFS

Les vacances finirent de s'écouler.
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- Tu es une grande fille maintenant, me déclara maman.

Une grande fille qui allait quitter sa maison, sa famille pour entrer en pension.
C'est un clair jour d'automne 1933. Le camion du laitier du village s'arrête près de chez nous. Sur la plate-forme arrière, il y a déjà tout un attirail, celui d'une fille de Meures, Jacqueline Bausoleil, à peine entrevue à l'école, lors de nos séances d'entraînement, mais qui allait progressivement devenir mon amie de toujours. Nous hissons nos affaires à côté des siennes. Un beau volume! matelas et couvertures roulés dans des toiles, malles pour le linge et les vêtements, toutes sortes de boîtes réglementaires en bois blanc, marquées de jolies lettres noires imprimées : Chaussures - Toilette - Provisions. Cette dernière bien cadenassée. Nous avions scrupuleusement souscrit à tous les impératifs de la liste imposée. Nous avions confectionné tout ce qui était possible, un édredon de satinette rouge gonflé de plumes et bordé d'un cordonnet bordeaux torsadé, même le matelas de laine et de crin. Tout au long des vacances, au fil rouge, au point de croix - deux fils, deux fils - mais en lettres fantaisie joliment ornées, j'avais marqué de beaux draps tout neufs, des serviettes éponges de bonne qualité, j'avais brodé des sous-vêtements, apaisé mes sentiments tumultueux. De préparation intellectuelle, aucune! Tout commençait à la rentrée.
C'est ainsi que j'entrai dans un monde imprévisible et de confusion totale. Que sentent les petits chats quand on les sépare de leur mère? Que sent l'oiseau qu'on met en cage? l'ourson qu'on prive de sa banquise? J'ai toujours détesté les zoos et les cirques. Et moi, j'y entrais.
à suivre..

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Touchant billet. Micheline, si j'ai compté comme il faut, tu avais 13 ans, l'âge où effectivement on est "grande fille" mais pas tant que ça... à mon avis un âge délicat où l'affectif est tellement importnt, où commencent les bouleversements de la "jeune fille" avec tous ses questionnements, ses angoisses... que l'on a besoin de partager, auxquels on aurait besoin de réponse et de compréhension. C'est pas dit qu'à la maison ce soit forcément mieux,tout dépend ce que l'on y vit, donc je ne fais pas de comparaison ni n'émet de préférence. Juste que je pense que bien des enfances ont été perturbées et que parfois il est légitime de ressentir de la bonne fierté d'être devenus ce que nous sommes...
Je t'embrasse fort.

Anonyme a dit…

Je relis et j'apprécie...
Hier, comme tu sais, sur la route. Aujourd'hui panne de chauffage.
Demain : journée chargée...
Juste le temps de passer...
A tout bientôt quand même : j'ai mon ADSL !

Brigetoun a dit…

et je vois que je suis une jeunette toute relative, de mon temps nous commandions des rouleaux de petits rubans de serge marqués à notre nom que nous cousions sur les éléments du trousseau. Mais je n'ai pas eu droit à la pension seulement à, dès que je disais non "si tu continues tu iras à la Légion d'honneur" et je filais doux. Je comprends le petit noeud dans la gorge lors du premier départ

Anonyme a dit…

J'ai eu la chance de ne pas connaître la pension mais je ne crois pas que j'aurais apprécié...
Par contre je suis en admiration devant : "édredon de satinette rouge...bordé de cordonnet bordeaux.... beaux draps brodés au point de croix etc...un vrai trousseau de luxe (fait main)à l'heure actuelle.

marie.l a dit…

Joyeux Noël et bonne année Micheline !
à bientôt !